S'il est certes faux que la jeune actrice ne doit sa notoriété
qu'à la série "Buffy contre les vampires",
force est de constater qu'elle lui a ouvert de nombreuses portes.
Passée en quelques années du statut de comédienne
de sitcom américain à celui de super-star internationale,
Sarah Michelle Gelalr nous a confié ses états d'âme...
"Le malheur des uns fait le bonheur des autres", dit le proverbe. Ayons donc une
pensée émue pour la pauvre Kristy Swanson, la première
Buffy, celle du film originel, qui demeura l'éternelle perdante
de cette affaire - elle qui n'aura jamais réussi à tirer
les marrons du feu ! Ceci n'ôte cependant rien aux mérites
de Sarah Michelle Gellar : Son succèes, elle ne l'a pas volé
à sa devancière, elle l'a conquis de haute lutte. Car
si Buffy contre les vampires est aujourd'hui devenue la série
la plus regardée de la chaîne qui a le mieux progressé
en termes de chiffres d'audience ces dernières années
aux USA, elle le doit tout autant à ses qualités intrinsèques
(déjà présentes à l'état latent dans
le film, mais laminées par les supérieurs de Joss Whedon)
qu'à la personnalité de son héroïne - et notamment
son incongruité apparente (après tout, que venait donc
faire ce petit bout de femme chétive à la moue boudeuse
dans ce combat contre les forces du mal ?).
Débuts difficiles
S'il y a manifestement un après-Buffy, vu le nombre de
films qu'on lui a récemment proposés (Souviens-toi
l'été dernier, un gros succès, Simplement
irrésistible, une comédie romantique qui a très
vite disparu des écrans américains et dont elle se contrefiche,
et Sexe intentions, une version moderne des Liaisons dangereuses,
qu'elle adore), il y eut aussi fatalement, un avant-Buffy. Et
inutile de dire qu'il fut bigrement moins reluisant ! Car, pendant longtemps,
elle ne fut qu'une new-yorkaise tentant de faire son trou à Los
Angeles. "J'étais à peine capable de payer mon loyer",
se souvient-elle. Heuresement, Sarah à très tôt
appris à mener elle-même sa barque. "Quand j'étais
môme, j'ai joué dans un spectacle sur une scène
off de Broadway avec Matthew Broderick et Eric Stoltz",
raconte-t-elle. "Eux, après les représentations,
ils allaient au bar, pendant que, moi, je retournais à la maison
faire mes devoirs." Et dès que les notes qu'elle rapportait
de l'école descendaient en-dessous du A-, son institutrice
de mère la privait d'auditions ! "Chaque jour, je faisais
du skateboard et du tae kwon do, puis j'allais à l'école,
j'enchaînais avec les karaté, et je terminais la journée
par les auditions", reprend-elle. "Et ma mère a fini
par me dire : 'Parmi toutes tes activités, il y en a deux qu'il
va falloir que tu arrêtes, et aucune des deux ne sera l'école
!' ". Sarah a fait le bon choix : elle a gardé les arts
martiaux et la comédie, deux ingrédients qui ont largement
contribué au succès de la série. Joss Whedon,
qui s'est façonné une héroïne à mi-chemin
entre la jeune fille sage et la dominatrice, a eu le nez creux !
Teenage angst
Première étape-clé de sa carrière, Sarah
remporte un Emmy Award pour sa prestation dans la sitcom All my children.
"A quinze ans, mon rôle me faisait coucher avec Micheal
Nader, qui, lui, en avait cinquante", s'exclame-t-elle. "Je
jouais un personnage plus âgé que je ne l'étais
réellement, mais je n'étais pas plus vieille pour autant
et la meilleure chose que je puisse dire pour décrire cette période
de ma vie, c'est que j'y ai appris à mémoriser un script
de soixante pages en deux heures et à bien jouer la comédie
sans faire de l'ombre aux autres acteurs." Tout comme Carrie,
le roman de Stephen King que Brian de Palma a porté à
l'écran, Buffy utilise le surnaturel en guise de
métaphore pour dépeindre les tourments de l'adolescence.
Les personnages principaux de la série sont tous, d'une certaine
façon, des exclus, et Buffy en est le plus tragique exemple :
cherchant désespérément à s'intégrer,
plus elle s'acharne à mener une vie normale, plus elle s'en écarte.
et naturellement, tomber amoureuse d'un vampire âgé de
quelques centaines d'années à qui il est interdit de l'aimer
en retour n'est pas fait pour faciliter les choses !
Similitudes frappantes
Parfois, il arrive en outre que la frontière séparant
la réalité de la fiction s'estompe. Sarah et Buffy ne
sont en effet pas si différentes que cela. Il est une opinion
toute féminine - que l'on retrouve d'ailleurs exprimée
dans la série - qui veut que la douleur physique rende palpable
la souffrance générée par l'anéantissement
d'un grand amour, celle-ci étant par trop abstraite pour être
canalisée. Follement éprise d'un Angel qu'elle sait à
jamais hors d'atteinte, Buffy n'a d'autre réconfort que de sortir
chaque nuit exploser la tronche des méchants pour en revenir
couverte d'ecchymoses, seules traces physiques extérieures témoignant
de la souffrance qu'elle endure intérieurement. "J'ai déjà
vécu une histoire d'amour aussi forte que celle-ci" révèle
Sarah. "Tout ce qu'à ressenti Buffy, je l'ai déjà
expérimenté moi-même auparavant dans ma propre chair.
Mais si tu n'as jamais aimé quelqu'un aussi profondément,
je ne vois pas comment je pourrais arriver à l'expliquer."
Sarah, elle aussi, en garde une trace physique, puisqu'elle s'est alors
fait tatouer à la cheville un dessin représentant un poignard
suspendu au-dessus d'un coeur. "Je me le suis fait faire après
un terrible chagrin d'amour", explique-t-ell. "Je voulais
pouvoir me rappeler à quel point l'amour est précaire.
Le poignard se balance au-dessus du coeur... Prêt à frapper
!" Voilà pourquoi, l'année dernière, à
l'époque de la déchirante rupture entre Angel et Buffy,
Sarah rentrait souvent chez elle en pleurs. "Je ne rammène
pas de démons à la maison, mais le désespoir de
Buffy, lui, me suit comme mon ombre", confie-t-elle. "Je suis
immunisée contre les vampires, mais pas contre l'émotion
! Quand on a tourné l'épisode dans lequel Angel casse
avec Buffy, j'ai pleuré vingt-cinq minutes sur le plateau. Je
croyais même que j'allais me taper une dépression nerveuse
et j'ai contraint toute l'équipe à cesser de travailler."
Un soupçon d'obscénité
Par certains aspects, Buffy est tout aussi érotique
que violente. Dans un épisode de sinistre mémoire - l'un
de ceux qui furent déprogrammés aux USA suite au massacre
de Littleton -, on peut voir une scène éminemment plus
pernicieuse que celles où figurent des armes à feu : Buffy
supplie Angel, qui est en train de mourir, de s'abreuver de son sang.
"Quand Angel mord Buffy, elle se contorsionne sur le sol et a un
orgasme tellement puissant qu'elle en vient à casser une table",
affirme Sarah. "C'est l'une des choses les plus érotiques
qui aient jamais été diffusées à la tété
et les comités de censure sont passés totalement à
côté - il n'y ont vu que du feu !" Or, pour une série
programmée à une heure de grande écoute, Buffy
montre beaucoup de choses et s'en sort plutôt bien, niveau
censure - hormis en Angleterre ! Dans un autre épisode, on voit
notamment Alex prendre son pied en regardant une Willow toute de cuir
vétûe torturer par le feu un Angel enchaîné
Qu'est-ce don, si ce n'est pas du sadommasochisme ? "La télévision
n'est pas censée délivrer des messages de santé
publique", s'insurge Sarah. "Quand Angel est Buffy ont couché
ensemble, ça a provoqué un tollé général
parce qu'on n'avait pas pris la précaution de montrer des préservatifs
sur la table de nuit. Faudrait voir à pas déconner non
plus ! Voilà une fille de seize ans qui fait l'amour avec un
vampire de deux cent quarante quatre ans ! Il est clair qu'on sort du
cadre du réel ! Les leçons, c'est aux profs et aux parents
de les donner. Pas à la télé, d'accord ?"
Pascal Andrieu
Transcript de Viper