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> Référence : "l'Ecran Fantastique" n°190
(octobre 99) |
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"Contes cruels de la jeunesse"
Comme il désormais de coutume, c'est la rentrée des classes
pour la Tueuse. Avec cette troisième saison, Joss Whedon et
son équipe ouvrent à nouveau les portes de l'enfer,
pour lacher les vampires, démons et sorcières aux trousses
de la petite Buffy. Survol des premiers épisodes d'une saison
en enfer...
Les dernières aventures de la Tueuse de vampires avaient plongé ses fans dans
une attente cruelle. Si les portes de l'enfer étaient à
nouveau scellées et le clan des saigneurs de la nuit démantelé,
Buffy en avait payé le prix fort : la mort de Kendra et la destruction
d'Angel de sa propre main. Au terme d'un véritable chemin de
croix, l'Elue abandonnait son foyer et ses amis pour une destination
inconnue. La gageure de cette troisième saison consistait à
reconstruire un environnement autour de Buffy et à introduire
des personnages aussi charismatiques que Spike et Drusilla. Le défi
est relevé avec brio au long d'une troisième saison capitale
qui verra Buffy fêter ses 18 ans et prendre le chemin de l'unversité.
Un budget amplifié permetl'élaboration de décors
encore plus spectaculaires et de scènes de combat réglés
à la perfection.
Retour au bercail
Toutes ces qualités apparaisent dès le premier épisode
de la nouvelle saison, Anne (le titre fait référence
au second prénom de Buffy Summers). Les "slayerettes"
préparent tristement leur rentrée des classes et ten,tent
de lutter contre les morts-vivants. Mais leurs efforts, sans les pouvoirs
de la Tueuse, s'avèrent pour le moins dérisoires. Dans
une ville inconnue, Buffy semble piégée dans une existence
solitaire et sans espoir, tourmentée par des rêves où
Angel l'enlace en plein soleil sur une plage. Joss Whedon décrit
une métropole angoissante, peuplée de sans logis et d'enfants
à la dérive. Mais bien sûr, le surnaturel ne tarde
pas à reprendre ses droits : Buffy découvre, dans les
profondeurs de la ville, un clan de démons kidnappant des adolescents
pour les réduire en esclavage. Dans cette dimension parallèle,
une vie de servitude ne dure que quelques jours à la surface
et ce sont des vieillards hébétés, ne pouvant que
répéter "je ne suis personne", qui s'en retournent
dans notre monde. Avec une grande profondeur, Whedon parle de l'ecploitation
des adolescents, des actes misérables qui peuvent détruire
une vie. Cette descente aux enfers incite Buffy à reprendre le
chemin de Sunnydale où un autre douloureux combat l'attend :
les retrouvailles avec sa mère et ses amis vivants dans l'inquiètude
depuis son départ.
Dans le masque de Cordolfo, Buffy doit affronter les griefs de
son entourage tout en combattant une armée de cadavres possédés
par un masque nigérien. Whedon accentue les deux traits caractéristiques
de la série : l'horreur et les envolées sentimentales.
Le masque de Cordolfo est sans doute l'un des épisodes les plus
gores du show (évoquant parfois Evil Dead) mais aussi
l'un des plus émouvants. Pendant leur violente scène de
dispute, Sarah Michelle Gellar et Alyson Hannigan révèlent
une nouvelle fois l'exceptionnel niveau d'interprétation de la
série. L'épisode permet également de replacer Buffy
dans son univers : Oz et Cordelia sont désormais des membres
réguliers des "slayerettes", quant à Willow,
elle reprend la fonction tenue par Jenny Calendar, celle de "techno-païenne",
mariant informatique et magie blanche.
Une nouvelle saison apporte généralement son lot de personnages
inédits. On se souvient que les quelques instants de mort clinique
de Buffy avaient entrainé l'apparition d'une nouvelle Tueuse,
le très belle Kendra. Dans l'épisode n°3, La nouvelle
petite soeur, l'erreur se reproduit et une nouvelle Elue est envoyée
à Sunnydale pour remplacer Kendra. Cette dénommée
Faith est très différente de la "Tueuse des Caraïbes".
A la chasseuse "intégriste" s'est substituée
une guerrière désabusée et marginale. Faith sera
plus tard qualifié de "spartiate", se défiant
des liens sentimentaux, toujours prête à tout quitter dans
la seconde. Mais Faith n'arrive pas seule à Sunnydale : un sinistre
équipage la suit à la trace, composé de Kakistos,
démon séculaire et de Mr. Trick vampire noir, élégant
et moderne, destiné à devenir un personnage récurrent
de la 3ème saison. Adepte de la technologie et lié au
crime organisé, Mr Trick apporte une nouvelle dimension aux non-morts
de Sunnydale, en rupture avec l'univers moyenâgeux du Maître,
la "punk-attitude" de Spike ou le romantisme de Drusilla et
Angel. L'épisode recèle une scène qui fera battre
le coeur des fans du "fiancé des ténèbres"
: retournant dans l'usine où son amour fut détruit, Buffy
dépose sur le sol le médaillon, ultime présent
d'Angel. Alos qu'elle a quitté les lieux, une forme nue et tremblante
se matérialise sur le sol. Angel est de retour !
Les amours des "slayerettes" avec des créatures surnaturelles
constituent le sujet du quatrième épisode : Les belles
et les bêtes. Avec la découverte du corps déchiqueté
d'un jeune homme, les soupçons portent à nouveau sur Oz,
le fiancé loup-garou de Willow. Mais au cours de sa ronde, Buffy
capture unbe autre créature : Angel. Son retour dans notre monde
semble l'avoir transformé en un être mi-humain, mi-animal,
muet et hagard. Pourtant, ni le lycanthrope, ni le sombre saigneur ne
sont les coupables. buffy découvre la vérité en
voyant l'une des lycéennes brutalisée par son fiancé
: l'assassin est un jeune homme qu'une potion, censée lui apporter
un regain de virilité, transforme en meurtrier sadique. Le scénariste
Marti Noxton revient sur un thème déjà abordé
dans Billy (les cauchemars d'un enfant battu) et Ted (le
beau-père robot tortionnaire). Qu'elle soit exercée sur
les enfants ou à l'intérieur d'un couple, la violence
contre les plus faibles est l'un des sujets phares de la série.
A travers les clans vampires, Buffy affronte tout d'abord des figures
despotiques axant leur règne sur la terreur et l'oppression.
Audacieusement, Joss Whedon n'hésite pas à invoquer d'autres
démons, comme la nette référence à l'Allemagne
nazie de l'épisode Meilleurs voeux de Cordelia.
Une 3ème saison au beau fixe
Récit d'aventures humoristiques, Le bal de fin d'année
est un véhicule idéal pour le duo ravageur Buffy-Cordelia,
chacune postulant au titre de reine de fin d'année. Buffy se
souvient de ses années de lycéenne superficielle maintes
fois couronnées et se jette dans la bataille avec toute l'énergie
du "Slayer". Mais, alors que les rivalent se rendent à
la fête, leur limousine est détournée et elles se
retrouvent au milieu de nulle part. Les deux jeunes filles découvrent
qu'elles sont devenues le gibier d'une chasse à la Tueuse organisée
par Mr Trick. Parmi les concurrents, des jumeaux allemands terroristes,
Lyle gorch, son épouse Candy et un démon jaune à
nageoires du nom de Kulak. Mais il faut plus d'une armée de démons,
vampires et mercenaires pour empêcher cordelia d'assister au bal
de l'école. Cet hilarant épisode, très inspiré
du classique de Shoedsack Les chasses du comte Zaroff, réserve
deux surprises de taille. Tout d'abord l'alliance que Mr Trick conclut
avec Richard Wilkins, le maire de Sunnydale, personnage mégalomane
dont l'excentricité évoque celle de Benjamin Horne de
Twin Peaks. Mais surtout, un l'affaire qui a causé un
vif émoi outre-atlantique : un retournement de situation sentimental
dont nous ne dévoilerons rien avant le moi prochain.
Avec le 6ème épisode, Effet chocolat, Whedon livre
un des épisodes les plus surprenants de la série. Cette
comédie repose sur un pari risqué qui pourrait faire sombrer
les personnages dans le grotesque. Mr Trick et le maire, avec l'aide
du spécialiste en farce de mauvais goût Ethan Rayne (voir
Halloween et Face Cachée), distribuent du chocolat
ensorcelé qui conduit les adultes à se comporter en adolscents
irresponsables. Profitant de l'absence des forces de l'ordre, le maire
capture les bébés d'une nursery. Il espère ainsi
s'attirer les bonnes grâces de Larconis, un démon qui tous
les trente ans en fait son repas. Les scènes les plus drôles
de l'aépisode sont dues au principal Snyder se transformant en
garnement aussi turbulent que les "mauvais éléments"
de son lycée. Autre grand moment, la liaison entre Rupert et
Joyce, la mère de Buffy. Giles, une chemise nouée autour
de la taille, une cigarette derrière l'oreille et le coup de
poing facile, nous laisse entrevoir ce que fut la jeunesse du "Ripper".
Quant à Joyce, vétue d'une minijupe et d'un outrageant
manteau en plume des années 70, elle se livre à divers
actes de délinquance juvénile sous le regard consterné
de sa fille.
La fièvre dans le sang
Apres le ton globalementhumoristique des deux épisodes précédents,
Joss Whedon, pour Révélations, renoue avec avec
une veine plus sérieuse et classique. Les "slayerettes"
découvrent que les relations entre Buffy et Angel ont repris.
Giles, encore hanté par la mort de Jenny, laisse entrevoir une
peine allant bien au-delà de ses devoirs d'Observateur. Pendant
ce temps, Gwendolyn, l'observatrice de Faith arrive à Sunnydale
à la recherche du Gant de Mynhegon, un nouvel ustensile démoniaque.
Alors que Buffy demande à Angel de l'aider à détruire
ce gant, Xander (note : Alex en français) et Faith s'associent
pour éliminer son ex-fiancé. Pénétrant dans
la cachette d'Angel, ils découvrent l'imposture de Gwendolyn
projetant d'utiliser le gant pour son propre compte. Bien que très
mouvementé et bénéficiant d'excellents effets spéciaux,
l'épisode laisse un goût amer. L'acharnement de Xander
à détruire angel ressemble moins à de la justice
qu'à une vengeance d'amoureux éconduit. quant à
Faith, la trahison de Gwendolyn l'enfonce davantage dans la tristesse
et la solitude. Une fois n'est pas coutume, les créateurs peinent
quelque peu à marier les tourments sentimentaux des personnages
avec un nouveau "McGuffin" démoniaque. La série
ne se départit cependant pas de ses qualités de dialgues
et d'interprétation. au cours de l'échange extrèmement
émouvant avec son mentor, Buffy est confrontée à
ses responsabilités. Face à la douleur de Giles, elle
ne peut plus se réfugier derrière son âge ou son
statut de disciple. S'emparant, comme avant lui David Lynch, des règles
du soap opera, Whedon signe le roman d'apprentissage d'une adolescente
franchissant le cap de l'âge adulte.
Cette première salve d'épisode achève de placer
Buffy contre les vampires parmi les meilleures séries
fantastiques du moment. Nous commenterons la suite des aventures de
Buffy Summers riches en péripéties exaltantes, dès
le mois prochain. Nous attend en effet Amours contrariées,
l'un des épisodes fétiches de cette troisième saison,
qui verra le retour de Spike à Sunnydale. Les "slayerettes"
ne seront pas en reste puisque les réalisateurs consacrent à
notre pimbêche préférée un épisode
fascinant, Meilleurs voeux de Cordelia, et que Xander, dans le
Zéro pointé, vit une folle soirée incluant
une virée avec des zombis, la perte de sa virginité et
la déroute d'un complot visant à faire sauter la lycée !
Stéphane du Mesnildot
Les plaisirs de l'enfer
Au commencement étaient les démons
Dés le premier épisode, Bienvenue à
Sunnydale, Whedon pose les bases de sa mythologie. A la nuit
des temps, notre monde était le territoire des démons.
Peu à peu, ces créatures ont vu leurs pouvoirs décliner
et perdu leur place dans notre réalité. Les animaux,
puis les hommes, firent leur apparition et la seule trace des
"Grands Anciens" demeura les rituels magiques et quelques
créatures de moindre importance (sorcières, loups-garous,
etc...). Cependant, un dernier démon était parvenu
à survivre en marge l'humanité.
Pressentant sa fin, il posséda un mortel auquel il méla son sang. Cet
humain doté de l'âme d'un démon fut à
l'origine de la race des vampires, se propageant par morsure et
rituels de communion du sang. Les vampires sont les agents des
démons dans notre monde : leur but est de permettre leur
retour dans notre dimension en ouvrant les portes de l'enfer.
D'où leur grande activité à Sunnydale, petite
ville bâtie sur une passerelle infernale. Tout en leur conférant
une origine inédite, Whedon conserve certaines caractéristiques
énoncées par Stoker dans son "Dracula".
Les vampires craignent les croix et n'apparaissent pas dans les
miroirs (ils peuvent néanmoins être photographiés
et filmés en vidéo), mais ils sont capables de pénétrer
dans un lieu sans y avoir été invités. Un
pieu planté dans la coeur les réduit cependant toujours
en poussière. En revanche, ils sont privés du pouvoir
de se métamorphoser en animaux ou en éléments
naturels tel le brouillard.
Les créatures de Whedon ont
une passion vestimentaire pour le noir et les manteaux de cuir,
et affichent un faciès animal grimaçant. Chez Angel,
Spike et Drusilla, cette "gueule" n'est que provisoire,
et n'apparaît que sous l'emprise de la soif et des émotions
violentes. Les vampires très anciens comme le Maître
l'affichent de façon permanente, tel un signe de damnation,
ultime effacement de leur part humaine. Alors que les vampires
rebelles comme Angel et Spike préfèrent une vie
solitaire, les créatures ont tendance à s'organiser
en clans. Autour de la Porte de l'Enfer, le Maître règne
sur des favoris comme Darla et possède une meute de sujets
dont il est difficile d'évaluer le nombre. Les vampires
sont aidés dans leurs manigances par des démons
inférieurs, résidant sur terre, tels l'ordre de
Taraka (aux trousses de Buffy dans l'épisode Kendra).
Les vampires ont également leur saint patron : St Vigeous
(voir Attaque à Sunnydale). Pendant les trois nuits
que dure sa fête, les saigneursconnaissent une regain de
puissance. Une autre de leurs caractéristiques concerne
l'absence de tout sentiment, leur âme ayant été
ravie lors de la possession. Angel, le vampire renégat,
fait exception à la règle puisqu'un sortilège
gitan lui a rendu son âme pour le faire vivre à jamais
dans le remords de ses actes. Son mauvais double, Angelus, est
connu dans les annales du vampirisme pour son intelligence et
sa perversité. D'une façon assez inexplicable, Spike
témoigne envers sa compagne Drusilla d'un attachement passionné
(Spike aura de très belles considérations sur l'amour
dans l'épisode la 3ème saison Amours contrariées).
Sans peur et sans reproche
Face aux vampires se dresse une organisation occulte, les Observateurs,
dont la mission est d'assurer la perpétuité d'une
figure nommée l'"Elue". Celle-ci est rituellemet
une très jeune fille dotée de pouvoirs surnaturels
: la faculté de percevoir la présence des vampires,
une force supérieure aux normes et, dans le cas de Buffy,
des dons de prémonition. L'existence de la Tueuse est aussi
ancienne que celles des vampires. Giles, l'Observateur de Buffy,
suggère énigmatiquement que la première Tueuse
serait née avec le premier vampire, comme une tentatinve
des forces du Bien pour équilibrer celles du Mal.
Lorsqu'une Tueuse disparaît une autre est immédiatement désignée
par les Observateurs (d'où l'apparition de Kendra aprés
l'expérience de mort temporaire de Buffy). Whedon ne donne
que peu d'informations sur les Tueuses précédentes.
Dans Bienvenue à Sunnydale, premier épisode
de la série, nous apprenons l'existence de Lucy Hanover,
officiant en 1866 pendant la Guerre de Sécession. Spike,
quant à lui, se vante de la destruction de deux Elues,
dont une jeune Coréenne pendant les années 30. Outre
Buffy, l'autre Tueuse d'importance de la série est Kendra,
Elue "rigoriste" vivant sa mission comme un sacerdose
et connaissant sur le bout des doigts les régles et l'historique
des vampires. Ce personnage extrèmement sympathique connaitra
une mort tragique, à la fin de la seconde saison dans l'épisode Acathla.
Avec la troisième saison et l'épisode
La nouvelle petite soeur apparaît Faith, qui succède
à Kendra. Faith accentue la caractère marginal de
la Tueuse, mercenaire vivant en marge de la société,
créature de la nuit au même titre que ses adversaires.
Avec Buffy, l'Elue en titre, les vampires se sont maintes fois
cassés les canines. La grande force de Buffy provient des
libertés qu'elle s'autorise avec le Dogme des Tueuse (la
plus grande étant son histoire d'amour avec Angel), ce
qui la rend totalement imprévisible pour les suppôts de Satan.
Buffy a également brisé le sceau du silence
en enrôlant ses amis Xander, Willow, Cordelia et Oz (surnommés
les "Slayerettes") dans la chasse aux vampires. Cette
personnalité, qui s'efforce de conjuguer sa lutte contre
les forces du mal avec les flirts et le shopping, insuffle une
dimension humaine et attachante à Buffy. entre la vie simple
d'une jeune fille et des responsabilités écrasantes,
cette héroïne dont Whedon ne fait pas une sainte (elle
peut à l'occasion se montrer capricieuse et égoïste),
est tourmentée par des choix cornéliensdans la tradition
des Marvels Comics de la grande époque.
Brassant avec bonheur les divinités lovecraftiennes, les clans vampiriques d'Anne
Rice et les séries B des années 50 (les célèbres
I Was a Tennage Werewolf et consorts), Joss Whedon est
parvenu à illustrer avec fidélité les doutes
et les combats de l'adolescence.
Stéphane du Mesnildot
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